ETUDE
HISTORIQUE SUR LA VILLE D'AUMALE - Période Française
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PERIODE
FRANÇAISE - 3
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-----Jusqu'au
mercredi 18 au soir, rien d'anormal. Le jeudi à 9 heures et demi
du matin nous entendîmes à moins de quatre cents mètres,
les premiers coups de feu tirés par les insurgés, contre la
tribu des Ouled Salem, préposée à notre garde. Aussitôt,
les militaires, mon père et moi, nous mîmes en état
de défense, après avoir fait rentrer notre troupeau. La fusillade
commença et dura jusqu'à 4 heures et demi du soir. Alors les
insurgés se retirèrent, laissant un mort, leur porte-drapeau,
Ben Temtem, qu'ils ne pouvaient enlever en raison de la proximité
de nos feux. -----Vers 5 heures, le zouave Pivert et moi, sortions du Bordj et nous emparions, lui, du drapeau confectionné d'un foulard de soie verte et jaune et attaché au bout d'un roseau, moi, du pistolet du mort, que je conservai comme souvenir. J'en fis cadeau plus tard au capitaine Girardin, qui désirait l'avoir. -----Vers 5 heures, le zouave Pivert fut proposé pour la médaille militaire, le zouave Lallemand, pour le grade de caporal. -----Le Zouave Ducoin qui se trouvait au bastion où fut tué Ben Temtem fut également proposé pour ce grade : dans la nuit du 19 au 20, un renfort envoyé d'Aumale et se composant de 70 cavaliers du 1er Chasseurs d'Afrique et d'un goum à peu près d'égale force, fit dans la nuit, une reconnaissance dans les Béni-Inthacem. Après avoir essuyé quelques coups de feu qui blessèrent à l'épaule gauche un maréchal des logis de chasseurs, un brigadier à la cuisse droite et tuèrent la jument d'un goumier, nous leur fîmes une vingtaines de victimes. L'ennemi se retira vers le Djebel Affroun. -----Pour couper la route à Bou-Mezrag, campé au lieu dit El Guintra, celui-ci -prévenu par un des goumiers à notre service, quitta son emplacement et vint nous attendre en pleine forêt d'Es-Sroudj (tribu des Msellem), ayant fait ainsi un grand mouvement tournant. Nos troupes arrivèrent à cet endroit vers 7 heures du matin et sans aucune défiance, elles furent accueillies par une vive fusillade partant de derrière les arbres. L'ennemi était fort de 2 à 3.000 hommes, notre colonne se composait de 800 hommes environ, goum compris. l'obusier et 150 chevaux. -----Le premier moment de stupeur passé, nous répondîmes par un feu vif ; après trois heures de lutte contre ces hordes fanatiques dont le nombre augmentait à chaque instant, le combat devint de plus en plus acharné de part et d'autre, les mobiles durent plusieurs fois charger à la baïonnette : dans leur ardeur, ils en vinrent à un corps à corps général. L'ennemi serré de quatre côtés à la fois, battit en retraite et se replia dans les ravins, où il fut accompagné par le tir bien dirigé de l'obusier servi par des canonniers Coquet et Ollagnier, du 3° d'artillerie, tir qui leur cause quelques pertes. -----Le lieutenant-colonel Trumelet fit plusieurs fois sonner le rassemblement et c'est avec trop de mal qu'il put se faire écouter. -----Les pertes ennemies étaient considérables, deux cents morts, autant de blessés, ainsi qu'un grand nombre de chevaux tués, blessés et abandonnés. |
-----Malheureusement
de notre côté, nous avions à déplorer la mort
de seize hommes et d'un officier. Ce dernier fut trouvé les mains
coupées, le lendemain, dans un épais fourré, par
les mokhasnis envoyés à sa recherche, ainsi que les corps
de 9 mobiles, complètement nus. Cette nouvelle mit la tristesse
dans nos rangs et ce n'est que grâce au sang-froid des officiers,
retenant leurs hommes qui voulaient à toute force venger leurs
camarades, que ceux-ci furent empêchés de se lancer spontanément
sur les traces de l'ennemi, dans une poursuite qui eut été
sans doute très dangereuse. |